AVENTURE AIROLOAccueil

Tout a commencé à la sortie du tunnel du Saint Gothard.

Nous débouchâmes encore tout ensomeillés dans la vallée d'Airolo, à Airolo même ( tant qu'à faire ), dont j'ignorais le nom tout autant que  l'existence jusqu'à ce que je me fusse décidé à participer à cette escapade en ces lieux mystérieux. Le soleil étincellait, la neige brillait, (ou le contraire je ne sais plus), et la journée s'annonçait d'une agréabilité tout émoustillante. Dehors, les enseignes et pancartes diverses trahissaient sans conteste le fait que les peuplades locales s'exprimaient en une langue plutôt éloignée de nos dialectes habituels et que donc preuve en était que nous nous trouvions bien dans des contrées fort lointaines où l'aventure ne pouvait que s'anoncer fort excitante.

 Le car stoppa et nous nous engoufrâmes dans le café qui devait subvenir au remplissage glucidique de nos réservoirs à calories, en d'autres termes nous subvînmes à l'incontournable rituel du petit déjeuner.

Puis re-car pour un léger gain d'altitude dans la vallée mystérieuse où nous fûmes lâchement abandonnés en un lieu où des traces diverses s'enfonçaient sous les sapins, que prenaient d'assaut ( les traces, pas les sapins ) d'autres skieurs sans doute aussi avides que nous d'entrevoir les cîmes lointaines qui nous étaient dévolues.

 Traces gelées et courts raidillons entres les troncs rapprochés...

Décollage... de la peau à l'arrière du ski. Merci Michel B. pour ton pschitt-pschitt salvateur. Le temps que çà sèche et me voilà relégué en queue de peloton...une fois n'est pas coutume! Mais finalement cela permet tout autant de profiter d'une solitude bienfaisante dans cette nature délicieuse dont la dimension spirituelle tente alors dans ces moments privilégiés de s'infilter en nos cellules amoindries par cette vie trépidante par trop matérielle que nous subissons au quotidien et bla-bla-bla on se calme sinon ils vont pas lire la suite.

Premier regroupement au sortir de la forêt. Chocolat, fruits secs, esquimaux glacés, tout le monde va bien, bon c'est reparti.

Groupes, sous-groupes, chacun son rythme, le temps est magnifique, la trace est bonne, "on s'attend à la cabane de Cristallina", dit Michèle, notre chef du moment.

Je parviens avec Michèle à la cabane en question, désaffectée, et Michèle décide que finalement çà serait pas plus mal de poursuivre jusqu'au col histoire de voir la tête de la voie qui mène au sommet du Cristallina. Michèle m'avoue qu'elle risque l'engueulade mais bon...Et on entend Antoine derrière: " Ah non, Michèle a dit qu'on s'arrêtait à la cabane, on s'arrête."

Arrivée au col. Déjà 1200m effectués.

Casse-croute, en compagnie également de Maggie et Denis qui nous tenaillaient de près, devant le Cristallina qui nous présente sa plus belle face zèbrée d'une slpendide trace d'une provocation délicieuse.

Antoine nous a rejoint. Il nous confirme qu'une partie de l'expédition a opté pour un casse-croute près de la cabane. Le départ pour le Cristallina ne se fait pas attendre, en tout cas pour Antoine dont on sentait le turbo ronronner doucement depuis un moment déjà. Michèle part à sa poursuite, puis ma modeste personne, ainsi que Maggie puis Denis. Michel M. suivra peu de temps après.

Les 400m de dénivelé sont rapidement avalés dans une trace excellente pour aboutir sur l'arête que l'on remontera à pieds jusqu'au sommet. L'effort est récompensé au delà de nos espérances, tant la vue est magnifique sur le Valais et l'Oberland, et sur le Basodino tout proche constituant notre programme du lendemain.

Descente un peu raide au départ, mais on retrouve vite les portions de sacs laissées au bas de la pente pour un allègement légitime, sauf votre narrateur qui, entraîné par ses qualités exceptionnelles de descendeur que chacun connaît s'est incongrûment retrouvé trop bas et par là même contraint à une remontée supplémentaire et gratuite.

Reformation du groupe puis poursuite de la descente par les pentes modérées et la neige de plus en plus lourde menant jusqu'au refuge de Basodino, long trajet par le bas du barrage et la route enneigée, agrémenté par le passage sous un tunnel de glace des plus pitoresques aux stalactites de toute beauté.

 L'arrivée au refuge nous renoue avec les aléas de la promiscuité, CIHM et autres Suisses ou Italiens ayant comme nous planifié cette halte nocturne en ce haut fond de vallée plongeant vers les plaines Milanaises.

Bières, coca, séchage des chaussures, tea-shirts et autres peaux, et admirable ténacité de Daniella dont l'obstination à retrouver l'Arva caché par Michèle à l'arrivée en ces lieux lui octroya l'indiscible plaisir de venir percuter successivement chaque membre des groupes du shime mettant pied sur la terrasse du refuge après leur propre virée montargnarde par d'autres cols et vallons divers.

Le dîner nous apprit beaucoup de choses sur la composition de la nature des gaz employés en plongée sous marine en fonction de la profondeur visée, argon, néon, hydrogène, azote, voire même je crois un peu d'oxygène si j'ai bien suivi. Michel B. semblait bien tenté par un baptème. Merci Daniella et Manu pour cette conférence d'un haut niveau scientifique.

Antoine, quant à lui à l'autre bout de la table dissertait sur des trucs du genre Everest, marathon et autres ballades dominicales de ce genre.

Passons sur les quelques soubressauts nocturnes liés aux diverses ouvertures et fermetures sucessives de la fenêtre du dortoir en vue d'un asservissement plus ou moins technique de la température des lieux, pour nous retrouver dès six heures trente le lendemain matin sur les planches affûtées pour l'assaut joyeux vers le Basodino.

Le temps est couvert et des nuages encapuchonnent les sommets.

Bof ! Ca va bien se dégager...

La synchronicité étant loin d'être au top dès que les groupes commencent à compter un nombre non négligeable de participants et lorsque de surcroît le refure est un tantinet encombré, Michèle décide que les premiers partent "et l'on s'attend dans une heure". Heureusement qu'Antoine ne semble pas avoir trop bien compris la consigne sinon il aurait été capable de nous attendre 1000m plus haut.

Le départ dans des traces de descente gelées est délicat et les contorsions, déséquilibres et glissades avortées diverses obligent à des efforts parfois ponctuellement violents et plutôt malvenus. Le replat qui suit une heure plus tard et dans une neige meilleure est bien apprécié et Michèle se propose d'attendre les retardataires pour les mener à la bifurcation qui permet d'atteindre le col de retour en évitant l'ascenssion du sommet.

Nous repartons donc, suivant les traces, et les quelques groupes, shime et autres, navigant sur le même itinéraire. Le temps se bouche de plus en plus et bientôt le brouillard nous enveloppe totalement pendant que quelques flocons commencent à choir doucement. Le sommet devenant dans l'évolution de la situation quelque peu hypothétique nous décidons bientôt d'un retour en arrière en vue d'un sympatique regroupement de notre équipe pour un affrontement solidaire et joyeux de ces conditions climatiques dont la jouissance n'en sera ainsi que plus profonde.

Joie des retrouvailles.

Légère incertitude persistante sur l'éventualité d'une tentative rapide au Basodino par quelques éléments motivés du groupe, vite gommée par l'insistance d'un brouillard finalement bien accrocheur qui définitivement nous raliera tous à un retour en commun soit dit en passant bien caractéristique du fantastique esprit de solidarité qui règne au sein de ce club dont l'éloge n'est plus à faire. (...peut-être un petit WE gratuit, ou bien non comptabilisé, en échange de ces petits compliments ? Non ? Bon, tant pis...).

C'est donc emplis d'une grande allégresse que nous poursuivîmes notre progression suivant des traces laissées par quelques prédecesseurs, mais jouant également de la carte, de la boussole et de l'altimètre en ces reliefs chaotiques trop fugitivement perceptibles pour cause de la densité accrue du brouillard déjà nommé.

Neige changeante...rythmes personnels et regroupements...pentes verglacées...couteaux pour les moins enhardis dont je fais partie...un premier col...une descente...une scission du groupe pour cause d'espoir déçu de ne pas avoir à remettre les peaux...un casse-croute, regroupés dans le froid près d'un lac gelé...remontée à nouveau...puis brouilard total...le grand blanc...boussole...tentative de certains esprits contestataires de mettre en doute les conclusions de nos chefs sur la direction à suivre...enfin le deuxième col...rangement définitif des peaux...début de descente...passage sous le plafond nuageux...et vue sur notre vallée de destination.

Malgré ces perturbations climatiques, attentes et regroupements divers, l'heure est loin d'être tardive et nous nous demandons tous à quoi nous allons bien pouvoir nous occuper en attendant le car en un lieu où la densité de troquets est à peu près équivalente à celle des pantations de tomates sur la face cachée de la lune.

Il fallait donc trouver une idée judicieuse pour nous obliger à rester et profiter encore davantage de ces pentes immaculées sur lesquelles nous glissions voluptueusement, insouciants points noirs dévalant les pentes des reliefs helvétiques.

C'est Maggie qui eu l'éclair de genou...pardon, de génie.

Elle bloqua à fond ses fixations et partit droit dans la pente pour un virage démonstratif avec blocage de la jambe droite dont les caractéristiques techniques rivalisèrent avec le plus pur professionnalisme de nos champions nationaux. Et voilà le travail !!!

Un cri dans l'immensité blanche...immobilité de notre athlète préférée...inquiétude générale...Jean-Luc et Daniella descendent prévenir les secours.

Mais c'est sans compter sur l'incroyable obstination de Maggie qui, redressant elle-même sa cheville dont l'axe l'orientation par rapport à la jambe aurait été propre à contredire n'importe quel manuel d'anatomie humaine des plus spécialisés, se relève et rechausse les skis, pendant que nous nous partageaons son sac pour quand même avoir l'impression de faire semblant de l'aider un tant soit peu.

Et voilà qu'elle embraye sa descente en escalier !! " Mais si si, tout va bien, vous inquietez pas..."  ( ben voyons !... )

Force est donc d'envoyer Antoine décommander l'hélico.

Au moins 400m de descente de cette façon ! Qui l'eût cru ?

Une grande leçon de courage, mais était-ce bien raisonnable ? Difficile de juger quand on n'est pas à la place de la blessée.

Nous arrivâmes ainsi à l'heure prévue, ni trop tôt, ni trop tard.

Soulagement pour Maggie !!

J'espère qu'au moment où elle lira ces lignes, la guérison aura déjà fait une bonne partie du chemin, et qu'elle recommence à nouveau à penser à ses sorties futures dans ces montagnes de rêve.

Le trajet en bus dans la Suisse profonde nous gratifiera des magnifiques paysages du lac des Quatres Cantons.

Fabuleux pays !

Patrice

PS: Je me posais des questions au retour en retraversant le tunnel du Saint Gothart. D'après la carte il est plus long que le tunnel du Mont Blanc. Ma carte est-elle à jour ? Quelqu'un peut-il me renseigner à ce sujet ?